(Paris, le 8 mars 2019) – Alors que la
France accueillera la conférence de reconstitution du Fonds mondial en octobre,
la lutte contre le VIH/sida se trouve à un tournant crucial. Si les efforts ne
s’intensifient pas, en particulier en direction des jeunes femmes et des
adolescentes, les progrès obtenus pourraient être considérablement remis en
question. La France, qui met en avant sa «diplomatie féministe», doit jouer un
rôle moteur pour trouver des réponses concrètes à cet état de fait.
Depuis près
d’une vingtaine d’années, la lutte contre le VIH/sida a suscité une
mobilisation internationale sans précédent, notamment via la contribution des États
au Fonds mondial de lutte contre le sida, la tuberculose et le paludisme.
Néanmoins, les progrès demeurent insuffisants pour mettre un terme à la
pandémie à l’horizon 2030. Le VIH/sida est encore la première cause de mortalité dans le monde chez les femmes de 15 à 49 ans[1]. Dans
la région d’Afrique subsaharienne, 75% des
nouvelles infections touchent les jeunes femmes de 15 à 24 ans. Ce chiffre est
particulièrement significatif pour le futur de la lutte contre le VIH/sida,
puisque l’Afrique sub-saharienne concentre 70% des personnes vivant avec le
VIH/sida et 66% des nouvelles infections annuelles, et que la population jeune
y est en pleine expansion[2].
Plusieurs facteurs entrent en jeu, au
premier rang desquels les inégalités liées au genre, qui limitent le pouvoir
décisionnel des femmes et des filles dans tous les domaines, à commencer par la
sexualité. Mariages précoces, violences, tabous liés à la sexualité, manque
d’accès à l’éducation et à l’information, lois coercitives, sont autant
d’obstacles à la négociation du port d’un préservatif ou à l’accès aux services
de santé.
Mais des solutions existent à
travers, tout d’abord, l’adoption d’une approche basée sur les droits humains
afin de lutter contre ces inégalités et de lever les barrières législatives et
normatives à l’accès des femmes et des filles à la santé et à l’autonomie. A
l’heure actuelle, les efforts en matière de santé sexuelle et reproductive et
de lutte contre le VIH/sida sont souvent menés séparément. Il s’agit ensuite de
proposer une offre de soins intégrée (éducation complète à la sexualité,
prévention et prise en charge des grossesses non désirées et des IST/VIH, soins
de santé maternelle et prévention de la transmission mère-enfant, accouchement
assisté, accès aux traitements, lutte contre les violences) pour toutes les
femmes. Ces approches doivent répondre aux besoins des jeunes femmes et des adolescentes
dans toute leur diversité, y compris les plus exposées au risque de contamination par le VIH/sida
(telles que les travailleuses du sexe, les femmes transgenres, et les usagères
de drogues par voie intraveineuse).
Le rôle de la France : assumer une
diplomatie « féministe »
En érigeant l’égalité femmes-hommes
au rang de priorité lors de la présidence du G7 2019 et en accueillant
également la conférence de reconstitution des ressources du Fonds mondial le 10
octobre prochain à Lyon, la France est doublement attendue. Le Président
français se verra en effet confier la tâche de mobiliser ses homologues dans la
lutte contre les pandémies afin d’intensifier substantiellement leur
implication politique et financière.
La France, qui affiche une diplomatie
«féministe», doit assumer sa position en promouvant et en finançant des
politiques appliquant l’approche genre, notamment en matière de lutte contre le
VIH/sida, avec l’objectif de transformer la société et d’agir sur les rapports
de pouvoir inégalitaires entre les femmes et les hommes.
L’implication de la société civile, en particulier féministe, est
primordiale pour répondre à ces enjeux. Sa présence dans tous les processus de
gouvernance est essentielle, à commencer par la Présidence française du G7 et
la reconstitution du Fonds mondial.
[1] UNAIDS, 2017