Alors que la France s’apprête à mettre à jour sa politique relative au développement solidaire et à la lutte contre les inégalités mondiales, l’ambition politique clamée en début de mandat s’est essoufflée.
Lors de la déclaration de politique générale, le Premier ministre a annoncé le renvoi à 2020 de l’examen de la nouvelle loi d’orientation et de programmation dédiée à ces questions, initialement prévue pour 2019. Avec cet ajournement, puis un nouveau report du Conseil sur développement, l’ambition présidentielle de renforcer le dispositif et les moyens de la coopération au développement et à la solidarité internationale tarde à se concrétiser. Ce texte doit pourtant doit fixer les orientations de la politique de développement dont l’enjeu est d’assurer la protection des biens publics mondiaux que sont, entre-autres, le climat, l’eau, la santé et l’éducation. Elle doit aussi préciser les modalités de mise en cohérence des autres politiques avec les objectifs du développement ; enfin donner la programmation budgétaire qui doit détailler la façon dont le gouvernement mettra en ½uvre l’engagement présidentiel à atteindre 0.55% du revenu national brut pour l’aide publique au développement. Il est regrettable que les atermoiements, le manque d’ambition et le délai dans l’adoption de la loi soient justifiés comme des conséquences des dépenses engagées dans le contexte social français actuel et la mobilisation des Gilets Jaunes.
Pourtant, les solidarités ne s’opposent pas. Bien au contraire, elles convergent. La défense et la promotion des biens publics mondiaux bénéficient, par définition, à l’ensemble de la population du globe. Nos concitoyennes et concitoyens ont bien conscience que sur de nombreux sujets, nos destins sont liés avec les pays les plus pauvres. Tous et toutes comprennent l’intérêt de se battre pour la défense des droits humains et la nécessité de lutter, aux côtés de nos partenaires, contre le changement climatique, et à construire des systèmes éducatifs, alimentaires, sanitaires et fiscaux efficients, durables et équitables. Ils attendent que nos pays luttent sérieusement contre les inégalités, y compris celles entre les femmes et les hommes, où qu’elles se manifestent.
Ce que nos concitoyennes et concitoyens veulent aujourd’hui, c’est la justice et l’équité, pour tous et toutes afin que les personnes les plus pauvres, et les plus vulnérables, où qu’elles soient, puissent vivre dignement. S’exprime ainsi le souhait d’une plus juste redistribution des richesses, en France et à l’échelle mondiale. Le gouvernement doit entendre cette soif de justice fiscale et de nécessaire solidarité et la traduire par des mesures concrètes sans plus attendre.
Or, retarder l’examen de cette loi revient à prévoir une trajectoire financière sur à peine deux ans, un non-sens budgétaire pour loi supposée programmatique. Il faut accélérer le processus et dès cette année, allouer des moyens à la hauteur des enjeux et le faire avec une prévisibilité nécessaire à une réponse efficace. Pour ce faire, d’un outil remarquable permet à la fois de financer notre politique de solidarité internationale et de répondre à l’aspiration ambiante à plus de justice fiscale : la taxe sur les transactions financières. Cette dernière a été créée à la suite de la crise de 2008 pour que le secteur bancaire, ayant largement bénéficié de la mondialisation et de l’envol des flux financiers internationaux, mais également du soutien de la puissance publique pendant la crise, participe à la lutte contre l’extrême pauvreté et le changement climatique.
Renforcer cette taxe en augmentant son taux et son affectation à la solidarité internationale, dès cette année, permettrait de faire un pas vers l’atteinte des engagements internationaux en matière d’aide publique au développement et répondant aux aspirations de nos concitoyennes et concitoyens: construire une société plus juste et un monde plus équitable.
Liste des signataires :
- Philippe JAHSHAN, Président (Coordination SUD)
- Cécile DUFLOT, Directrice Générale (Oxfam France) ;
- Bertrand LEBEL, Directeur Exécutif (Acting For Life) ;
- Thomas RIBEMONT, Président d’honneur (Action Contre la Faim) ;
- Catherine Sophie DIMITROULIAS, Présidente (AFEM) ;
- Frédéric APOLLIN, Directeur (Agronomes et Vétérinaires sans Frontières – AVSF) ;
- Gwenaëlle BOUILLE, Présidente (Aide et Action) ;
- Aurélien BEAUCAMP, Président (AIDES) ;
- Alexandra POTEAU, coordinatrice générale (Amis des Enfants du Monde) ;
- Thomas DE LA BOUVRIE, Trésorier (Antenna France) ;
- Alain CHEVALIER, President (APIFLORDEV) ;
- Alain BARRAU, Président (Asmae-Association S½ur Emmanuelle) ;
- Halimatou CAMARA, Présidente (Association des Jeunes Guinéens de France – AJGF) ;
- Benoît LAMBERT, Président (Association la Voûte Nubienne) ;
- Gilles COLLARD, Directeur Général (Bioforce) ;
- Philippe LEVEQUE, Directeur Général (CARE France) ;
- Sylvie BUKHARI-DE PONTUAL, Présidente (CCFD-Terre Solidaire) ;
- Bruno GALLAND, Conseiller technique régional (CIDR) ;
- Daneil VERGER, Président (CLONG-Volontariat) ;
- Sandra METAYER, Coordinatrice (Coalition Eau) ;
- Anne-Françoise TAISNE, Déléguée Générale (Comité français pour la solidarité internationale – CFSI) ;
- Julie STOLL, Déléguée Générale (Commerce équitable France) ;
- Thierry MAURICET et Xavier BOUTIN, Présidents (Coordination Humanitaire Développement – CHD) ;
- Emmanuel POILANE, Président (CRID) ;
- Emilie VALLAT, Directrice (ECPAT France) ;
- Hervé GOUYET, Président (Electriciens sans frontières) ;
- Armelle RENAUDIN, Cofondatrice (Entrepreneurs du Monde) ;
- Aurélie GAL-REGNIEZ, Directrice Exécutive (Equipop) ;
- Ruvie GAMBIA, Président (Etudiants et Développement) ;
- Gérald GODREUIL, Délégué Général (Fédération Artisans du Monde) ;
- Manuel PATROUILLARD, Directeur Général (Fédération Handicap International) ;
- Mackendie TOUPUISSANT, Président (FORIM) ;
- Matthieu GAUTIER, Directeur Général (Futur Au Présent) ;
- Laurence TOMMASINO, Déléguée Générale (GERES) ;
- Jean-Michel ROYER, Président (Gevalor) ;
- Bruno RIVALAN, Directeur Exécutif adjoint (Global Health Advocates / Action Santé Mondiale) ;
- Olivier BRUYERON, Directeur (Gret) ;
- Pierre JACQUEMOT, Président (Groupe Initiatives) ;
- Claude ROSENTHAL, Président (Gynecologie Sans Frontières) ;
- Cathy BLANC-GONNET, Directrice (HUMATEM)
- Alexis BEGUIN, Directeur Général (IECD) ;
- Marie Francoise PLUZANSKI, Présidente (Initiative Développement) ;
- François DOLIGEZ, Président (Inter-réseaux Développement rural) ;
- Johan GLAISNER, Directeur de programme (Ircom) ;
- Jean-Paul DAVID, Président (Kinésithérapeutes du Monde) ;
- Anouchka FINKER, Directrice Générale (La Chaîne de l’Espoir) ;
- Olivier ALLARD, Délégué (Général La Guilde) ;
- Malik SALEMKOUR, Président (Ligue des droits de l’Homme) ;
- Blaise DESBORDES, Directeur Général (Max Havelaar France) ;
- Dr Philippe DE BOTTON, Président (Médecins du monde) ;
- Xavier DEMANCHE, Directeur Général par Intérim (Partage) ;
- Dominique BISSUEL, Président (PARTAGE avec les enfants du monde) ;
- Yvan SAVY, Directeur (Plan International France) ;
- Stéphanie SELLE, Co-Directice (Planète Enfants & Développement) ;
- Thierry MAURICET, Directeur Général (Première Urgence Internationale) ;
- Jean-Louis MAROLLEAU, Secrétaire Exécutif (RESEAU FOI & JUSTICE AFRIQUE EUROPE) ;
- Rachid LAHLOU, Président-Fondateur (Secours Islamique France) ;
- Florence THUNE, Directrice Générale (Sidaction) ;
- Clotilde BATO, Déléguée Générale (SOL, Alternatives Agroécologiques et Solidaires) ;
- Alain CANONNE, Délégué Général (Solidarité Laïque) ;
- Antoine PEIGNEY, Président (Solidarités International) ;
- Isabelle MORET, Directrice Générale (SOS VILLAGE D’ENFANTS) ;
- Lysiane ANDRE, Présidente (Terre des Hommes France) ;
- Camille ROMAIN DES BOSCS, Directrice Générale (Vision du Monde) ;
- Véronique MOREIRA, Présidente (Women Engage for a Common Future (wecf) France) ;
- Luc Barruet, Directeur Fondateur (Solidarité Sida).