Évaluée par l’essai ANRS TasP (Treatment as Prevention), organisé dans une région de l’Afrique du Sud très touchée par le VIH, la stratégie « Dépistage et Traitement universels » ne présentait pas d’impact, en ce qui concerne la transmission (incidence) du VIH à l’échelle de la population[1]. Mais une nouvelle analyse des données a examiné l’impact du même essai sur la cascade de soins des personnes diagnostiquées avec une infection par le VIH. Ces résultats ont été présentés par Joseph Larmarange, de l’Institut de recherche pour le développement.
De 2013 à 2016, l’essai ANRS TasP a recruté 28.155 personnes qui ont bénéficié d’un dépistage du VIH, répété tous les six mois, ainsi que de la mise en place de centres de soins proches de chez elles. Ces personnes ont été réparties en deux groupes, afin de permettre la comparaison de deux approches. La première consistait à débuter le traitement antirétroviral des patients en fonction de leur nombre de lymphocytes CD4 – selon les recommandations nationales en vigueur à l’époque -, et pouvait donc impliquer un certain délai avant le démarrage du traitement. La seconde était « interventionnelle », c’est-à-dire qu’une fois leur séropositivité au VIH confirmée, les personnes recevaient aussitôt un traitement antirétroviral. En trois ans, 8.646 personnes infectées par le VIH ont ainsi pu être suivies.
Dans cette population suivie pour le VIH, les chercheurs ont constaté une augmentation importante des personnes ayant une charge virale indétectable : dans le bras « interventionnel », la proportion de patients présentant une charge virale indétectable est passée de 29 % à 46 % entre le début et la fin de l’essai ; dans l’autre groupe, autrement appelé « bras contrôle » ou « de comparaison », cette proportion est passée de 32 % à 45 %.
Quels sont les facteurs qui ont joué un rôle dans cette amélioration de la proportion de patients ayant une charge virale contrôlée ? En analysant les données, les chercheurs ont découvert qu’il s’agissait du dépistage, répété, du VIH à domicile (donc dans un environnement privé et confidentiel), et des centres de soins de proximité (où les personnes étaient examinées et recevaient leur traitement).
Ainsi, bien que la proportion de personnes présentant une charge virale indétectable n’ait pas été significativement différente d’un bras à l’autre de l’essai (fait expliquant, en partie, pourquoi il n’y a pas de différence en matière d’incidence du VIH, comme cela avait été révélé en 2016), ces résultats permettent de conclure que, dans une population rurale d’Afrique du Sud, fortement touchée par le VIH, le dépistage à domicile, répété tous les six mois, ainsi que la proximité des centres de soins, ont un impact positif sur la cascade de soins des personnes atteintes par le virus, même si l’amélioration constatée est inférieure à celle qui était espérée.
L’essai ANRS TasP est l’un des cinq essais internationaux comportant des bras de comparaison, et dont l’objectif est d’évaluer la stratégie UTT – Universal Test and Treat – sur la réduction de la transmission du VIH parmi des populations fortement touchées. Il a été conduit entre 2012 et 2016 dans le Kwazulu-Natal, région rurale d’Afrique du Sud où la prévalence du VIH est l’une des plus fortes au monde.
[1] Lancet HIV. 2018 Mar;5(3):e116-e125. doi: 10.1016/S2352-3018(17)30205-9. Epub 2017 Nov 30.