vih Budget 2025 : la santé, sacrifiée sur l’autel de la rigueur

09.04.25
Maëlle Boudet
4 min

Alors que l’exécutif ambitionne de réduire drastiquement la dépense publique, les choix budgétaires opérés pour 2025 soulèvent de nombreuses inquiétudes chez les acteurs de la santé. Le webinaire organisé le 2 avril dernier par le Collectif des 10 choix politiques[i] et animé par Hélène Meunier, ingénieure sociale et formatrice à l’Institut Régional du Travail Social (IRTS) à Montpellier, s’est attaché à décrypter les orientations du projet de loi de finance (PLF) et du projet de loi de finance de la sécurité sociale (PLFSS) pour l’année 2025. Notre compte-rendu.

Impact de la LFI et de la LFSS sur le coût et l’accès aux soins

Dans un contexte d’austérité budgétaire, la santé publique semble loin d’être la priorité du gouvernement. Avec une dette publique avoisinant les 110 % du PIB, la France assume une politique budgétaire de rigueur, où les coupes dominent. Le budget 2025 ne fait pas exception. « On est dans une logique de maîtrise, voire de réduction de la dépense publique, y compris dans le champ social et de la santé », précise Hélène Meunier.

Santé publique : des ambitions sans moyens

L’enveloppe globale dédiée au ministère de la Santé progresse timidement (+3,5 %), une hausse en trompe-l’œil qui ne permet pas de compenser l’inflation ni de répondre aux besoins croissants du secteur. Dans les faits, cela signifie moins de recrutements, des projets de santé reportés, et une pression constante maintenue sur les établissements. La santé devient une variable d’ajustement budgétaire, au détriment des patients comme des professionnels.

Les discours sur la modernisation ou l’efficience peinent à masquer une réalité plus rude : celle d’un système de santé à bout de souffle, sans marge de manœuvre pour investir dans le long terme. Le programme « Santé publique et prévention » continue ainsi d’être le grand oublié des arbitrages. Alors que les discours politiques martèlent l’importance de prévenir plutôt que guérir, les financements n’en suivent pas moins une pente inverse. « La prévention, c’est souvent le parent pauvre. Pourtant, tout le monde s’accorde sur son importance », souligne Hélène Meunier.

Ce paradoxe est d’autant plus criant que les défis sanitaires contemporains (maladies chroniques, santé mentale, inégalités sociales de santé) nécessitent des politiques ambitieuses, coordonnées et transversales. Les crédits alloués aux agences sanitaires, aux campagnes de dépistage ou à l’éducation à la santé sont insuffisants, voire en baisse. Et cela malgré les alertes répétées des professionnels et du monde associatif.

Par exemple, les crédits de la Mission Santé pour 2025 n’intègrent aucun plan massif pour lutter contre les addictions, accompagner les publics vulnérables ou répondre aux enjeux de santé sexuelle. Ce sont autant de signaux d’un désengagement progressif mais assumé.

Du côté de la LFSS, l’ONDAM (Objectif national des dépenses d’assurance maladie) est en légère hausse (+3,2 %), mais cette progression ne résout aucun des problèmes que rencontrent l’hôpital, les professionnels de santé et les usagers du système de santé.

« On sent un discours politique très tourné vers le retour à l’équilibre, sans réflexion de fond  »

Le financement de l’hôpital public reste en décalage avec ses besoins réels. Le personnel, déjà en souffrance, ne bénéficie pas des revalorisations promises et les fermetures de lits se poursuivent dans l’indifférence générale. Quant aux soins de ville, les mesures incitatives pour renforcer l’accès aux soins dans les déserts médicaux restent symboliques.

Si quelques annonces ponctuelles viennent donner le change, comme la gratuité de la contraception d’urgence sans ordonnance ou des revalorisations ciblées, elles ne suffisent pas à enrayer le sentiment d’une gestion au fil de l’eau, sans cap ni ambition.

Une vision comptable aux lourdes conséquences

Le cap fixé par le gouvernement repose sur une logique comptable déconnectée des réalités sanitaires. « On sent un discours politique très tourné vers le retour à l’équilibre, sans réflexion de fond sur ce que l’on veut faire en matière de santé publique », déplore Hélène Meunier.

Cette approche technocratique inquiète particulièrement les acteurs associatifs, pour qui la santé ne peut se résumer à une ligne budgétaire. En première ligne face au VIH, aux discriminations et à la précarité, ils peinent à voir dans ce budget les moyens d’une politique de santé ambitieuse, transversale et inclusive.

En misant sur une réduction des déficits à court terme, le gouvernement fait l’impasse sur les bénéfices à long terme d’un investissement dans la santé publique. L’inaction budgétaire actuelle pourrait coûter bien plus cher demain, tant sur le plan humain que financier.

  • En matière d’accès aux soins, les associations jouent un rôle irremplaçable. Présentes sur le terrain, au plus près des personnes précaires, discriminées ou éloignées du système de santé, elles assurent une mission de lien, d’écoute, d’accompagnement et de médiation que ni l’hôpital ni les pouvoirs publics ne remplissent.

    Or ce sont précisément ces structures, qui subissent de plein fouet, comme le précise Hélène Meunier, les coupes budgétaires dans le champ social et sanitaire. Faute de financements pérennes, nombre d’associations voient leurs moyens fondre, leurs équipes s’épuiser, et leurs actions vitales menacées.

    Ce désengagement institutionnel n’est pas neutre : il fragilise les parcours de santé des personnes les plus vulnérables, accroît les inégalités d’accès aux soins, et compromet la lutte contre l’épidémie de VIH chez les populations clés.

Présentation du webinaire
Présentation du webinaire
PDF (4,2 Mo ) – 54 pages
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Note et références

[i] Le Collectif des 10 Choix Politiques pour en finir avec le sida rassemble : 19 COREVIH (Les Comités de Coordination régionale de lutte contre les Infections Sexuellement Transmissibles et le VIH sont des structures de démocratie en santé, créées par l’État en 2005) ; 54 associations nationales et territoriales, dont 6 sociétés savantes et réseaux professionnels ; 17 chercheurs.

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