À l’origine de plus d’un tiers des décès, le cancer est la première cause de mortalité des personnes vivant avec le VIH Récemment, sa prise en charge a connu plusieurs évolutions importantes.
Les personnes vivant avec le VIH (PVVIH) ont deux à trois fois plus de risque de développer un cancer. En cause, notamment. la présence du VIH au sein des lymphocytes sur de longues périodes. « Même sous traitement antirétroviral, les PVVIH présentent une inflammation généralisée chronique qui peut favoriser l’apparition de tumeur ou affaiblir le système immunitaire de sorte qu’il devient moins apte à éliminer les cellules cancéreuses», explique le Pr Jean-Philippe Spano, chef du service d’oncologie médicale à la Pitié-Salpêtrière (Paris) et coordonnateur du réseau national CancerVIH. Par ailleurs, l’allongement de l’espérance de vie des PVVIH grâce aux antirétroviraux (ARV) les expose plus aux cancers, favorisés par l’âge. Enfin, elles sont plus souvent concernées par des facteurs augmentant le risque de cancer, comme certains virus (HPV, VHB, VHC, EBV, etc.) ou le tabac.
Une prise en charge concertée
Si les recommandations sont les mêmes que pour la population générale, certaines précautions s’imposent. « Il faut notamment tenir compte des possibles interactions médicamenteuses entre les ARV et les antitumoraux », précise le Pr Spano. C’est pourquoi « le traitement d’une affection maligne chez une PVVIH ne peut être finalisé qu’après concertation entre l’équipe impliquée dans la prise en charge de l’infection par le VIH (infectiologue, virologue) et oncologue, hématologue et pharmacologue lors d’une RCP [réunion de concertation pluridisciplinaire] », souligne le chapitre «Cancers» du rapport Morlat.
Les RCP constituent l’une des grandes nouveautés de la prise en charge des PVVIH atteintes d’un cancer. « Il existe une RCP nationale, créée en 2074, et accessible par webconférence à tous les médecins de France et des DOM-TOM, et des RCP régionales, comme celles de la région Paca à Marseille ou de la région Auvergne à Clermont-Ferrand », précise Marianne Veyri, chef de projet pour le groupe CancerVIH à la Pitié-Salpêtrière.
« À ma connaissance, ces réunions constituent une démarche spécifique à la France, souligne la Pr Isabelle Poizot-Martin, du CHU Sainte-Marguerite (Marseille). Mais le recours à ces RCP n’est pas encore devenu un réflexe pour l’ensemble des cancérologues – de même que le dépistage systématique de l’infection par le VIH lors du bilan initial de tout cancer De plus, si le nombre de dossiers soumis à la RCP nationale est en constante progression, des disparités persistent entre les régions dans la prise en charge des cancers chez les PVVIH. » Elle estime que ces disparités pourraient être gommées par la mise en place de RCP dans toutes les régions.
Autre grande nouveauté dans la prise en charge des PVVIH atteintes de cancer : la possibilité de recourir à un nouveau traitement anticancéreux : l’immunothérapie. Reposant sur l’utilisation d’anticorps particuliers (anti-CTLA-4, anti-PDl ou anti-PD-L1), cette approche consiste non pas à cibler directement la tumeur, mais à stimuler le système immunitaire afin qu’il puisse éliminer de lui même cette dernière. Plusieurs études sont en cours afin d’évaluer la tolérance de ce type de thérapie chez les PVVIH, comme l’essai IFCT- 1602 CHIVA2 ou la cohorte ANRS CO24 Onco VIHAC. En attendant. « la prescription d’une immunothérapie doit s’accompagner d’une surveillance clinique du patient. avec notamment les mesures du taux de CD4 et de la charge virale», souligne le Pr Spano.