En quelques décennies, la sexualité des seniors a nettement rajeuni. Pourtant, nombreux sont ceux qui ne se sentent pas concernés par le risque VIH, et ne recourent ni au préservatif ni au dépistage, pointe un sondage IFOP publié par Sidaction à l’occasion de la Journée mondiale de lutte contre le sida. Or près d’un quart des découvertes d’infection surviennent chez les plus de 50 ans.
Les seniors constituent-ils l’angle mort de la prévention du VIH ? Si les associations et les médecins s’inquiètent de la prise en charge et de l’accompagnement des personnes vieillissant avec le VIH, le sujet de la prévention chez les plus de 50 ans demeure encore mal exploré. Pourtant, leur sexualité a pris un sacré « coup de jeune » en quelques décennies. Lors de la dernière grande Enquête sur la sexualité en France, menée en 2006, 90% des femmes de plus de 50 ans en couple déclaraient avoir une activité sexuelle, alors qu’elles n’étaient que 50% en 1970. Et 55% d’entre elles disaient considérer les rapports sexuels comme nécessaires au bien-être, contre 33% en 1970.
Pourtant, si la sexualité n’est plus si taboue chez les seniors, nombre d’entre eux continuent à percevoir l’infection par le VIH comme un risque lointain, comme le révèle un sondage IFOP publié par Sidaction à l’occasion de la Journée mondiale de lutte contre le sida, jeudi 1er décembre. Menée sur 1.500 personnes âgées de 50 à 79 ans, dont 72% se déclarent actifs sexuellement (66% avec un seul partenaire, 6% en multipartenariat), l’enquête démontre que les seniors sous-estiment bien souvent leur risque d’infection par le VIH.
Un multipartenariat qui se protège peu
Moins d’un quart d’entre eux (24%) disent avoir utilisé au moins un préservatif avec un partenaire au cours des 12 derniers mois, contre 63% chez les jeunes -selon un autre sondage IFOP, mené en février auprès de 15-24 ans. Ce moindre recours au préservatif s’explique certes par une plus forte proportion de personnes disant avoir un partenaire régulier (90%, contre 41% chez les jeunes), mais pas seulement : chez les 6% de seniors ayant plusieurs partenaires sexuels (6,6 partenaires en moyenne), 24% disent ne jamais utiliser de préservatif. De même, le taux de dépistage s’avère très faible chez les seniors : seulement 7% ont pratiqué un test VIH au cours des 12 derniers mois, contre 20% des jeunes. Chez les 6% de multipartenaires, ce taux n’atteint que 28%.
Bien que témoins directs des années 1980, seuls 50% des seniors disent se reconnaître dans l’affirmation « le sida me fait peur », contre 63% des jeunes. Malgré leur faible recours au préservatif et au dépistage, 89% des plus de 50 ans s’estiment bien informés des risques. « Davantage ‘casés’ et sexuellement actifs que les plus jeunes, les 50-79 ans témoignent d’une vie amoureuse remplie, avec une minorité non négligeable (entre 1 et 1,7 million) étant soit en couple formé après 50 ans, soit avec plusieurs partenaires sexuels au cours des douze derniers mois. A ce titre, ces populations spécifiques apparaissent au moins aussi concernées que les plus jeunes par la problématique de la transmission du VIH/sida », note l’IFOP.
Moins de dépistage, plus de prise en charge tardive
« Concernées » certes, mais sans en avoir forcément conscience. Or, comme le montrent les chiffres publiés mardi 29 janvier par Santé publique France, les seniors constituent une part importante de l’épidémie française de VIH : en 2021, 23% des nouvelles découvertes sont survenues dans cette classe d’âge. Demeurée stable entre 2014 et 2017 autour de 20% (après une nette augmentation entre 2008 et 2014), cette proportion semble repartir à la hausse, note l’organisme.
Autre particularité, le poids accru des rapports hétérosexuels : parmi les hommes de plus de 50 ans ayant découvert leur séropositivité en 2016, 47% l’ont contracté lors d’un rapport homosexuel, contre 66% chez les 25-49 ans. De même, les seniors touchés par le VIH comptent moins de personnes nées à l’étranger, en particulier de migrant.e.s originaires d’Afrique subsaharienne : 59% chez les femmes plus de 50 ans, contre 82% chez celles de 25-49 ans.
Du fait de leur moindre attention au VIH, et donc d’un moindre recours au préservatif et au dépistage, les seniors sont plus à risque d’être diagnostiqués tardivement que leurs cadets. En 2016, le taux de dépistage à un stade avancé (sida et/ou taux de CD4 inférieur à 200/mm3) était de 38,3% chez les plus de 50 ans, contre 25,7% chez les 25-49 ans, notait Santé publique France dans une analyse publiée en 2018. « Le niveau de dépistage insuffisant chez les seniors peut être expliqué par une moindre perception du risque de contamination par le VIH, à la fois par les personnes elles-mêmes mais également par les professionnels de santé, alors que l’exposition à l’infection persiste au-delà de 50 ans. Il est donc important que les actions de prévention incluent cette population », notait alors l’organisme. Un constat demeuré sans écho, toujours d’actualité fin 2022.
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