vih Convention Aeras : « Il est grand temps de faire avancer les choses »

01.05.21
Vincent Michelon
7 min
Visuel Convention Aeras : « Il est grand
temps de faire avancer les choses »

Au cours des derniers mois, Une intense mobilisation associative a abouti en mars à l’adoption d’une nouvelle grille de référence pour les personnes séropositives dans le cadre de la convention Aeras, qui régit l’accès aux assurances emprunteur en cas de risque de santé aggravé. Une évolution saluée par la députée LREM Laurence Vanceunebrock, particulièrement engagée sur la question. Pour cette dernière, il est encore possible d’aller plus loin.

Transversal : Pour quelles raisons vous êtes-vous mobilisée en faveur d’une évolution de la convention Aeras ?

Laurence Vanceunebrock : Pour deux raisons. D’abord, j’ai moi-même été concernée par cette convention Aeras lorsque j’ai eu un cancer. J’ai été confrontée à ce problème du crédit immobilier. Avec mon ex-épouse, nous avons voulu acheter une maison en commun, à parts égales. Pour emprunter, j’ai dû passer par la convention Aeras et je me suis retrouvée à payer une assurance pour le crédit immobilier qui me coûtait, chaque mois, cinq fois plus cher que celle de mon ex-compagne, alors que je n’étais assurée que dans l’hypothèse d’un décès et non en invalidité. La deuxième raison, c’est que j’ai été contactée par l’association Séropotes, qui milite pour la révision des grilles Aeras. C’est évidemment entré en résonance avec mon histoire personnelle. J’ai tout de suite bien appréhendé le sujet et j’en ai compris la problématique. C’est pour ces raisons que j’ai adressé une question au gouvernement (le 8 décembre dernier, NDLR) et que je me suis penchée sur le sujet. 

T. : Quelle a été votre démarche ?

L.V. : J’ai demandé à la commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale, à laquelle j’appartiens, de pouvoir obtenir une mission d’information, ou bien de pouvoir organiser des tables rondes en procédant à des auditions. J’ai donc auditionné des associations concernées par le sujet, ainsi que les assureurs. En outre, au sein du gouvernement, Elisabeth Moreno (ministre déléguée à l’Égalité des chances, NDLR) est totalement mobilisée sur le sujet. Elle doit organiser elle-même une table ronde avec certains des acteurs et les parlementaires. Cette rencontre a été reportée en raison de la situation sanitaire, mais elle aura bien lieu. L’idée, me concernant, était de permettre à mes collègues de la commission des affaires sociales de prendre conscience du problème. J’avais aussi envie d’en passer par là afin d’alerter les assurances sur le fait que nous avions la volonté de changer les choses, s’agissant des critères de la grille Aeras mais aussi sur de la composition de la commission de suivi en charge du dispositif Aeras. Il y a en effet un entre-soi dans cette commission. Sur une trentaine de participants, vingt-cinq sont des assurances. Il est grand temps de faire évoluer les choses. 

T. : La mobilisation associative, ainsi que la prise de position de l’épidémiologiste Dominique Costagliola au sein de la commission de suivi, ont permis en mars dernier de faire évoluer significativement cette grille de référence pour les personnes vivant avec le VIH. Que pensez-vous de cette évolution ? 

L.V. : C’est très positif. La mobilisation de Dominique Costagliola et le remue-ménage qu’on a pu faire avec les associations a amené les assurances à bouger sur le sujet. Les professionnels se sont dit qu’il valait mieux faire évoluer la convention avant que le sujet s’invite devant le Parlement. Les choses évoluent, tant mieux. Maintenant, il faut que nous, parlementaires, soyons vigilants sur le contenu de cette évolution et qu’elle permette aux gens atteints du VIH d’accéder au crédit de façon tout à fait normale. On m’a signalé le cas d’un candidat à l’assurance qui s’était vu imposer une surprime de 600%, en contradiction totale avec les engagements conventionnels. Les gens atteints du VIH sont ultra suivis d’un point de vue sanitaire et médical. Ce sont des clients pour les assurances bien moins problématiques que le quidam, qui n’est pas suivi aussi régulièrement. Il n’y a aucune raison de leur infliger des conditions défavorables. 

En outre, la commission est censée rendre un rapport régulier aux parlementaires, mais le dernier rapport remontait à dix ans. Il y a vraiment un problème de clarté et de transparence. La possibilité de faire évoluer la grille de référence repose sur de nouvelles études scientifiques. On voit bien que des recherches ont été menées pour les personnes atteintes d’un cancer, mais pour le VIH cela n’a pas été fait. Tout le monde rejette la faute sur le manque de budget. Ne pourrait-on pas demander aux assurances de contribuer à ces recherches, par esprit mutualiste ? 

T. :  Faut-il aller plus loin ?

L.V. : ll faudrait financer des programmes de recherche spécifiques pour toutes les pathologies relevant de la convention. On peut aussi envisager la possibilité d’élargir la grille de référence Aeras, afin de faire bénéficier le maximum de personnes en risque aggravé d’une assurance dans des conditions standard. Il faudrait également améliorer l’information du public et montrer que malgré cette convention, les conditions discriminatoires demeurent. Il faut que davantage d’associations de patients puissent intégrer la commission de suivi pour pouvoir peser dans les décisions. 

T. :  Peut-on imaginer une évolution législative ?

L.V. : J’ai peur, d’un point de vue législatif, de ne pas pouvoir faire avancer grand-chose d’ici à la fin de ce mandat. Le calendrier parlementaire est extrêmement contraint et nous ne sommes pas aidés par la crise sanitaire, même si je souhaite prendre ce sujet à bras le corps. Mon idée est de continuer à travailler avec les associations, les assureurs, le Parlement. L’objectif n’est pas tant de légiférer que de faire avancer cette convention pour que tout le monde puisse bénéficier de crédits immobiliers ou à la consommation de façon normale, sans se sentir discriminé, ou tout simplement empêché d’y accéder. Si les choses devaient en rester là, en revanche, il faudrait légiférer à terme.  

La commission de suivi de la convention Aeras a approuvé le 12 mars dernier une nouvelle grille de référence qui comprend d’importantes avancées pour l’accès à l’assurance et au crédit des personnes vivant avec le VIH. Cette nouvelle mouture abolit tout d’abord le critère relatif à la consommation de substances illicites, que les associations dénonçaient de longue date comme discriminant. En outre, est également écarté le critère exigeant l’absence d’un « stade sida ». Ce dernier est remplacé par l’exigence d’une « absence d’infection opportuniste en cours ». 

S’agissant de la charge virale, la nouvelle grille abandonne le principe d’un compte de lymphocytes CD4 supérieur à 350/mm³ dans l’historique thérapeutique. Ce seuil est remplacé par la nécessité de démontrer « un contrôle strict de la charge virale, indétectable, 12 mois après le début du traitement », ainsi qu’un taux de CD4 supérieur ou égal à 500/mm³ dans les 24 mois précédent la souscription de l’assurance.

Enfin, le plafonnement à 27 ans de la durée entre le début du traitement et la fin du contrat d’assurance, en vigueur jusqu’alors, est porté à 35 ans, avec une couverture de prêt limitée à 35 ans. 

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