vih Exposition périnatale au VIH : des séquelles neurocognitives chez les enfants non infectés

31.07.22
Nora Yahia
5 min

Le huitième workshop sur les enfants et adolescents exposés in-utero au VIH s’est tenu en ce vendredi 29 juillet lors de la 24ème conférence internationale sur le sida. Lors de cette session, les intervenantes sont revenues sur les difficultés auxquelles font face les enfants exposés in-utero au VIH mais non infectés.

La politique de prévention de la transmission du VIH de la mère à l’enfant a montré son efficacité, puisque le nombre de transmissions verticales a drastiquement diminué depuis le début de l’épidémie. Il existe malheureusement un revers à la médaille : le VIH semble tout de même impacter la santé et le développement des 15 millions d’enfants exposés au VIH in-utero mais non infectés dans le monde. Ces enfants, dont la grande majorité habite dans les pays d’Afrique sub-saharienne, sont plus à risque de développer des retards neurocognitifs.

Le cerveau se développe tout au long de la vie d’un individu. Pour autant, 80 % de son développement s’opère dans les trois premières années de vie. La formation de synapses neurologiques est à son apogée dans les premiers mois de vie. Les pics de développement des zones contrôlant le langage et les fonctions cognitives se situent elles aussi dans les premières années de vie.

Un développement moteur global plus faible

De nombreuses études ont mis en exergue l’apparition de problèmes neurocognitifs chez les enfants exposés in-utero au VIH. Cette année, une revue systématique de plusieurs études a été publiée dans la revue scientifique Lancet Child & Adolescent Health. Sur les 21 études comparant le développement neurologique des enfants exposés in-utero au VIH aux enfants non exposés, 57 % montrent une détérioration du développement neurologique chez les enfants exposés au VIH in-utero. Une méta-analyse réalisée sur huit grandes études (comparant 1856 enfants exposés in-utero au VIH à 3067 enfants non exposés) va dans le même sens. Les enfants exposés in-utero au VIH montrent un développement moteur global [i] plus faible et des difficultés de langage expressif [ii].

La Dr Catherine Weddenburn (Université de Cape Town, Afrique du Sud) travaille à comprendre quels sont les mécanismes à l’œuvre dans ce déficit du développement neurologique, en réalisant des études d’imagerie du cerveau. Dans une précédente étude, elle a montré que certaines zones du cerveau (matière grise, zone sous-corticale) de nouveau-nés (2-6 semaines) exposés au VIH mais non infectés étaient plus petites que chez les nouveau-nés non exposés. 

Lors de la session, elle a présenté les résultats de l’étude menée, pour vérifier si les effets observés dans les premières semaines de vie sont toujours présents dans les trois premières années de vie. 162 enfants (70 exposés in utero au VIH et 92 non exposés) ont passé des IRM afin d’analyser le volume occupé par les différentes parties composant le cerveau.

Les données indiquent que la zone sous-corticale chez les enfants exposés in-utero est plus petite que pour les enfants non exposés. Au sein de cette zone, une analyse plus poussée des différentes structures la composant a été réalisée. Des différences significatives ont été observées au niveau du putamen [iii] (5 % plus petit) et de l’hippocampe [iv] (3 % plus petit). 

Les études de grande ampleur manquent

Une analyse du développement neurologique a également été réalisée, pour mesurer le développement cognitif, moteur et du langage. Les enfants exposés mais non infectés ont un développement du langage plus faible que les enfants non exposés. Les chercheurs ont observé, chez ces enfants, une corrélation entre la taille du putamen et de l’hippocampe et le développement du langage. Ces données suggèrent que l’exposition in utero au VIH peut affecter le développement de la zone sous-corticale du cerveau, entraînant des séquelles neurocognitives chez ces enfants.

De plus en plus de recherches s’intéressent à cette population et permettent aux chercheurs et cliniciens d’en apprendre davantage sur les problèmes neurocognitifs qui surviennent chez les enfants à la suite d’une exposition périnatale au VIH. Ces efforts doivent continuer, car il reste encore beaucoup de questions sans réponses : possibles effets secondaires des nouveaux ARV donnés aux mères, identification des facteurs influençant ces changements, connaissance des effets à long terme pour ces enfants. 

Les intervenantes de la session ont souligné l’importance de réaliser plus d’études pour évaluer le développement neurologique de ces enfants et étudier les mécanismes sous-jacents, afin d’éclairer les futures stratégies d’intervention. Elles ont mis l’accent sur la nécessité d’améliorer les méthodologies de ces études, notamment par la mise en place d’études de grande ampleur avec un suivi sur le long terme et utilisant l’imagerie médicale.

Notes

[i] Fonctions qui nécessitent des mouvements de tout le corps et qui impliquent les grands muscles du corps pour effectuer des fonctions quotidiennes, telles que se tenir debout et marcher, courir et sauter, et s’asseoir droit à table.

[ii] Capacité de demander des objets, de faire des choix, de poser des questions, de répondre et de décrire des événements. 

[iii] Structure située au niveau des ganglions de la base. Cette zone du cerveau est notamment impliqués dans les fonctions de langage, motricité et comportement. 

[iv] Zone du cerveau qui est le site de la mémoire et des émotions. Elle est aussi impliquée dans les fonctions d’apprentissage. 

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