vih Jeunes et seniors, même mobilisation !

09.03.18
Pierre Bienvault
6 min

Comment s’adresser aux jeunes et aux seniors face au risque du VIH? Voilà une question désormais jugée cruciale par de nombreux acteurs de la lutte contre le sida. D’une prévention ciblée à une stratégie globale, la mobilisation de tous reste indispensable.

Certes, tout le monde reconnaît que la prio­rité est toujours de mener des actions ciblées en direction des deux groupes les plus expo­sés : les hommes ayant des relations sexuelles avec des hommes (HSH) et les hétérosexuels nés à l’étranger, très majoritairement en Afrique subsaharienne. En 2016, un peu plus de 6 000 personnes en France ont découvert leur séropositivité. Parmi elles, 44 % étaient des HSH et 39 %, des personnes migrantes. Et dans ces deux groupes, la grande majorité des contaminations (70 %) est survenue chez des personnes âgées de 25 à 49 ans.

Pour autant, l’épidémie n’épargne pas les jeunes homosexuels masculins. « Entre 2003 et 2013, on a assisté à une importante augmentation du nombre de nouvelles séropositivités chez les HSH de 75 à 25 ans. Depuis, c’est stabilisé, mais les chiffres restent éle­vés», indique Franck Barbier, responsable des nouvelles stratégies de santé sexuelle à Aides. Une inquiétude partagée par le Conseil national du sida, qui, début 2017, a clairement tiré la sonnette d’alarme «La fré­quence des infections sexuellement transmis­sibles (IST) en général, et de l’infection par le VIH en particulier, est élevée et continue à aug­menter chez les jeunes.» Tout en constatant que « l’épidémie VIH n’est pas contrôlée chez les jeunes HSH ».

Savoir s’adresser aux jeunes HSH

En 2016, sur l’ensemble des découvertes de séropositivité chez des HSH, une sur six (15 %) concernait des jeunes de moins de 25 ans. Un groupe qui, semble-t-il, a beaucoup moins recours au dépistage que les homosexuels plus âgés. Tel est le constat de la 4ème édition du Net Gay Baromètre, une étude réalisée en 2013 et 2014 par le biais de questionnaires en ligne diffusés sur des sites de rencontres spécialisés. Dans cette enquête, un quart des 18 000 répondants était des jeunes de 16 à 24 ans. Et parmi eux, seulement 40 % avaient réalisé un dépistage VIH au cours de leur vie, contre près de 85 % chez les 25 ans et plus.

L’enquête montre aussi que, parmi ces jeunes gays, certains ont des pratiques à risque. En particulier ceux ayant déclaré avoir eu plus de 13 partenaires au cours des douze derniers mois : 71,6 % d’entre eux fré­quentent des lieux de sexe, dont 67 % ont eu au moins une fois un rapport sexuel non protégé. Et 45 % ont déclaré avoir eu un rapport non protégé avec un partenaire sérodifférent ou de sta­tut sérologique inconnu. Autre constat : parmi ces jeunes HSH, 13 % ont participé à une rela­tion sexuelle tarifée.

« Pour toucher les nouvelles générations de HSH, on ne peut pas miser uniquement sur une prévention faite en milieu communautaire. Car une bonne partie a tendance à mettre à distance les lieux gays. Et même à dire que le sida, c’est une affaire de vieux gays», indique Lucile Bluzat, en charge du marketing social au sein de l’unité de santé sexuelle de Santé publique France. Il est essentiel de développer des actions de pré­vention ciblée sur Internet et de favoriser les actions entre pairs.

Une stratégie globale pour tous

Une affaire de« vieux» le VIH ? Certes, non. Mais la génération des « cheveux blancs» reste concernée. Ainsi, les plus de 50 ans représentent aujourd’hui plus d’un tiers (37 %) des découvertes de séropositivité chez les des découvertes de séropositivité chez les hétérosexuels nés en France. Et les seniors, aussi, semblent se sentir à distance du sida. C’est ce que montre une étude menée en 2014 par le laboratoire Janssen auprès de 1 310 per­sonnes de 50 à 70 ans et de 543 personnes de 18 à 49 ans. Parmi les seniors interrogés, seulement 12 % ont déclaré se sentir concernés par le risque du VIH, contre 28 % dans le groupe des 18-49 ans. « Les 50-70 ans n’estiment pas faire partie des populations à risque», souligne cette enquête, en relevant qu’un peu moins de la moitié de ces seniors (46 %) ont déjà réalisé un dépistage.

En 2016, tous publics confondus, les plus de 50 ans ont représenté 20 % des nouvelles découvertes de séropositivité en France. Un chiffre qui s’est stabilisé après une forte augmentation entre 2013 et 2014 (de 13 % à 21 %). En 2010, la ministre de la Santé, Roselyne Bachelot, avait compris la nécessité d’atteindre ces seniors en préconisant une politique de dépistage en population générale. L’idée était d’inciter les généralistes à proposer un test à l’ensemble de leurs patients, y compris les plus de 50 ans. Mais cette stratégie a échoué face aux réticences des médecins de famille à parler du VIH à des patients venus consulter pour une tout autre raison. « Les médecins de ville ne sont pas à l’aise pour proposer ce dépistage. Cela ne concerne pas uniquement les géné­ralistes, mais aussi les urologues ou, par exemple, les gynécologues pour les femmes, constate le pr Gilles Pialoux, chef du service des maladies infectieuses de l’hôpital Tenon (Paris). D’abord, ils n’aiment pas l’idée de devoir annoncer éven­tuellement un résultat positif. Ensuite, surtout, ils estiment que proposer un test VIH risque d’entraîner un débat qui dépasse le cadre de la consulta­tion. Cela peut les amener à parler de sexualité, qui reste souvent une question taboue chez les plus de 50 ans. »

Pour le Pr Pialoux, il est essentiel de bana­liser l’offre de dépistage et notamment de l’intégrer dans un bilan de santé plus large, englobant les tests des virus de l’hépatite C et B. «On doit aussi pouvoir proposer ce dépistage à l’occasion d’une consultation autour des troubles de la sexualité qui peuvent survenir après la cin­quantaine ou dans la cadre d’un dialogue sur le dépistage de certains cancers, comme celui du côlon ou du sein», estime Lucile Bluzat.

Directrice du Crips de la région Paca, Céline Offerlé estime que cette stratégie globale doit aussi être utilisée chez les jeunes. « Aujourd’hui, on ne fait plus de prévention en parlant uniquement du VIH, mais dans le cadre d’une éduca­tion plus large à la vie affective et sexuelle. En parlant aussi de contraception et de grossesse non désirée», explique-t-elle. 

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