vih Les femmes et le VIH : un combat contre les inégalités

08.03.24
Sonia Belli
6 min
Visuel Les femmes et le VIH : un combat contre les inégalités

Les femmes sont touchées de manière disproportionnée par le VIH par rapport aux hommes. Cette disparité découle de multiples obstacles sociaux, économiques et culturels qui entravent leur accès à la prévention, au dépistage et aux traitements.

Creative Commons 2.0 France (BY-NC-SA) William Hamon

Bien que les avancées médicales aient permis d’améliorer significativement la qualité de vie des personnes séropositives, le VIH reste un enjeu de santé publique majeur à l’échelle mondiale. Certains groupes de population sont en effet particulièrement vulnérables. Parmi elles, les femmes, en particulier les jeunes filles, les femmes trans, les migrantes et les travailleuses du sexe, sont confrontées à des disparités significatives en termes de prévention, de dépistage et d’accès aux soins dans le monde entier. Cette situation est le résultat d’une combinaison complexe de facteurs sociaux, économiques et culturels.

La situation dans le monde et en France

Selon l’ONUSIDA[i], les filles et les femmes représentent actuellement plus de la moitié des 37,7 millions de personnes vivant avec le VIH dans le monde. En 2022, on estimait que les femmes étaient environ 20,2 millions à vivre avec le VIH, soit un peu plus de 53 % de l’ensemble des adultes touchés par la maladie (contre 46 % en 2002). Cette prévalence est particulièrement élevée dans certaines régions, notamment en Afrique subsaharienne où les femmes 77 % des nouvelles infections chez les jeunes âgés de 15 à 24 ans [ii].

En France, la situation est tout aussi préoccupante. Malgré la baisse globale des nouvelles infections ces dernières années, les femmes demeurent une part importante des nouveaux cas de VIH : environ un tiers des nouvelles infections diagnostiquées les concernent, dont 63 % sont des migrantes.

Des facteurs de vulnérabilité accrus

Plusieurs facteurs contribuent à accroître la vulnérabilité des femmes face au VIH. Les inégalités de genre, comme l’accès limité à l’éducation et aux ressources économiques, ainsi que les normes sociales discriminatoires, augmentent leur risque d’exposition au VIH. Dans de nombreux contextes, les femmes ont moins de pouvoir de négociation en matière de relations sexuelles et de contraception, ce qui les expose à un risque plus important de transmission du virus.

Les femmes sont aussi plus exposées au VIH en raison de facteurs biologiques. En raison de la superficie des muqueuses féminines et de la fragilité des parois vaginales, les risques de transmission du VIH d’un homme vers une femme sont environ deux fois plus élevés. Chez les femmes trans, particulièrement touchées par le VIH, les interactions entre les traitements ARV et la prise d’hormones, encore mal comprises, posent des défis supplémentaires dans la prise en charge et la prévention du VIH.

Les femmes vivant avec le VIH peuvent aussi être confrontées à des problématiques spécifiques liées à leur santé reproductive. Cela concerne notamment l’accès à des services de santé sexuelle et reproductive de qualité, la prévention de la transmission mère-enfant (PTME) du VIH et la prise en charge des comorbidités en lien avec le VIH pendant la grossesse.

Le défi des stratégies de prévention et d’intervention

Pour réduire la prévalence du VIH chez les femmes et améliorer leur accès aux soins, une approche globale et intégrée est nécessaire. La prévention en est le pilier fondamental. Cette stratégie passe notamment par la mise en place de programmes éducatifs et de sensibilisation spécifiquement adaptés à leurs besoins, afin de leur permettre de prendre des décisions éclairées sur leur santé sexuelle et reproductive. Cela inclut l’accès à une information claire et précise sur les modes de transmission du virus, ainsi que sur les moyens de se protéger.

Les programmes de PTME (Prévention de la Transmission Mère-Enfant) ont d’ores et déjà permis de réduire de manière significative le nombre de nouvelles infections chez les nourrissons nés de mères séropositives : en 2022, 82 % des femmes enceintes vivant avec le VIH, soit 1,2 million de femmes, ont pu recevoir des antirétroviraux, contre 46 % en 2010. De nombreuses femmes découvrant leur séropositivité lors de consultations pré-natales, il est important de les encourager à utiliser ces services pour protéger leur santé et celle de leur enfant. Pour atteindre celles qui peuvent être réticentes en raison de la stigmatisation ou de la violence basée sur le genre, une approche efficace consiste à intégrer les services de dépistage du VIH dans d’autres soins de santé, comme le dépistage du cancer du col de l’utérus.

Il est également essentiel de donner accès aux femmes à des méthodes de prévention du VIH qu’elles contrôlent elles-mêmes, comme la PrEP (prophylaxie pré-exposition), pour répondre à leurs besoins spécifiques et renforcer leur autonomie en matière de prévention. Malgré cette nécessité, seules 3 % des personnes utilisant la PrEP en France sont des femmes. Cette situation pourrait en partie s’expliquer par le fait que les campagnes de prévention et de sensibilisation les ciblent moins que les hommes.

Lutter contre les inégalités

Au-delà de la dimension médicale, promouvoir l’égalité des genres est essentiel, car les inégalités sociales, économiques et culturelles accroissent la vulnérabilité des femmes face au virus. La stigmatisation persistante associée au VIH, particulièrement forte chez les femmes, entrave considérablement leur accès aux soins et aux traitements. La crainte du jugement social peut les dissuader de se faire dépister et de rechercher des soins appropriés.

Les violences basées sur le genre constituent un autre facteur de risque majeur, qui compromet leur capacité à négocier des pratiques sexuelles sûres et à accéder aux services de santé. Protéger les femmes appartenant à des groupes de populations clés, telles que les jeunes femmes, les travailleuses du sexe et les femmes trans, est un autre point crucial. Pour combattre les inégalités auxquelles elles sont confrontées dans la lutte contre le VIH, il est nécessaire de promouvoir l’autonomisation des femmes, de lutter contre les discriminations et de renforcer leur accès aux ressources nécessaires.

Notes et références

[i] https://www.unaids.org/en/resources/infographics/girls-and-women-living-with-HIV

[ii] https://www.unaids.org/fr/keywords/women-and-girls

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