Les femmes sont aujourd’hui les plus touchées par l’épidémie de VIH/SIDA à travers le monde. Une situation, nourrie par les inégalités de genre, que la crise sanitaire ne fait qu’accentuer.
L’ONUSIDA estime que 38 millions de personnes vivent avec le VIH à travers le monde, dont « 20,1 millions de jeunes filles et de femmes » d’après les dernières estimations de l’organisation onusienne. Ainsi plus de la moitié des personnes séropositives à travers le monde sont des femmes. En Afrique du Sud, elles sont 4,8 millions à vivre avec le virus, 1,4 million au Mozambique, un million en Tanzanie, un million au Nigeria… Ailleurs dans le monde, l’ONUSIDA estime que 330 000 femmes vivent avec le VIH au Brésil, 210 000 en Thaïlande, 110 000 en Ukraine… [i]
En Afrique subsaharienne, les femmes et les jeunes filles représentent 59 % des nouvelles infections par le VIH [ii]. Chaque semaine, à travers le monde, environ 7000 jeunes femmes de 15 à 24 ans sont infectées par le VIH.
Parmi les femmes, celles qui appartiennent à des populations clés – c’est-à-dire des groupes particulièrement concernés par le VIH, comme les travailleuses du sexe, les femmes qui s’injectent de la drogue, les personnes trans – sont particulièrement exposées au risque d’infection. L’ONUSIDA soulignait ainsi en 2014 que, d’après les données de 30 pays, la prévalence du VIH au sein d’un même pays chez les femmes qui s’injectent de la drogue est de 13 % contre 9 % pour les hommes ayant recours à la même pratique [iii].
Un risque plus important de contracter le virus
Si les femmes en tant que telles ne constituent pas une population clé, les risques de contracter le virus sont plus élevés pour elles. Tout d’abord pour des raisons biologiques. « Les femmes sont probablement plus susceptibles d’être infectées par le VIH au cours de n’importe quel genre de rapports sexuels que les hommes en raison de facteurs biologiques » résume l’Organisation mondiale de la Santé (OMS). En effet, les risques de transmission du VIH d’un homme vers une femme sont environ deux fois plus élevés que dans l’autre sens, notamment en raisons de la superficie des muqueuses féminines, de possibles microdéchirures des tissus du vagin couplés à la quantité et la teneur en virus des fluides masculins.
Mais cette inégalité biologique face au virus n’explique pas tout. Elle est clairement renforcée par un ensemble de dominations de genre qui accroissent les risques encourus par les femmes de contracter le virus. Elles ont moins accès à l’éducation, y compris l’éducation sexuelle, que les hommes ; elles sont plus précaires et dépendantes économiquement, plus exposées à des violences…
Or des études ont montré que les adolescentes d’Afrique subsaharienne n’ayant pas terminé leur cycle d’étude secondaire ont deux fois plus de risque d’être infectées par le VIH. Dans les régions où l’épidémie est généralisée, les femmes qui subissant des violences de la part d’un partenaire intime ont 50 % plus de risque d’être infectées par le VIH, et moins de possibilités d’accéder et de suivre un traitement antirétroviral. Plus précaires, les femmes ont plus souvent recours au sexe transactionnel pour survivre, ce qui leur impose des rapports où il leur est difficile de se protéger contre le risque d’une infection. Autant d’éléments que la crise actuelle liée à la pandémie de COVID-19 est venue renforcer.
« La crise de la COVID-19 a également été un revers pour les acquis en matière d’égalité entre les femmes et les hommes. Elle a renforcé ces disparités pour ce qui est de la santé, des revenus, de l’accès aux services, de la charge du travail non rémunéré, du statut et du pouvoir » s’inquiétait la directrice exécutive de l’ONUSIDA Winnie Byanyima dans son discours du 8 mars 2021, journée internationale du droits des femmes. Interruption de la scolarité des filles, risque accru de mariage précoce, hausse des violences faites aux femmes, aggravation de la précarité économique… Les effets de la crise du COVID-19 creusent des inégalités dont sont déjà victimes les femmes et les jeunes filles à travers le monde, tout en fragilisant de manière générale les avancées de la lutte contre le VIH/SIDA.
Prendre en compte le genre pour lutter contre le VIH
A Djibouti, par exemple, le confinement mis en place au mois de mars 2020 a empêché les activités qui assurent de modestes revenus journaliers à nombre de femmes, relate la pédiatre Dr Emma Acina, présidente de l’association Solidarité féminine. Comme ailleurs, les mesures de lutte contre la COVID-19 ont plongé nombre d’habitants de ce pays d’Afrique de l’Est dans une urgence sociale et sanitaire, qui peut s’avérer désastreuse pour les femmes vivant avec le VIH. Solidarité féminine a rapidement organisé l’accès à des kits alimentaires et des cartes de crédit téléphonique pour maintenir un lien entre les bénéficiaires et les accompagnateurs psycho-sociaux de l’association, tout en maintenant les « distribution de substituts lactés pour les mères séropositives », jugées « primordial[es] » par Dr Acina.
La transmission verticale, de la mère à l’enfant lors de la grossesse, de l’accouchement ou de l’allaitement, bien qu’en baisse, reste en effet une réalité pour des milliers d’enfants chaque année. Avec la crise du COVID-19, l’ONUSIDA s’est inquiété d’un déclin des dépistages des femmes enceintes – le suivi de grossesse est le principal temps de test VIH pour les femmes – et de leurs accès aux antirétroviraux. En octobre 2020, l’organisation onusienne décrivait une situation « constratée » : d’après les données recueillis, plusieurs pays enregistraient une baisse des dépistages prénataux (Indonésie, Botswana, Sierra Leone) et un accès restreint aux traitements antirétroviraux chez les femmes enceintes vivant avec le VIH (Botswana, Afrique du Sud, Sierra Leone, Togo et Guatemala) [iv].
Une meilleure prévention des femmes face au virus et un meilleur accès de celles vivant avec le VIH à un accompagnement et des soins adaptés ne pourra que bénéficier à l’ensemble de la population. La prise en compte croissante des questions de genre dans la lutte contre le VIH/SIDA s’avère donc cruciale car l’inégalité face au virus est aussi une inégalité de genre.
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