Créée en 2002, la Plateforme ELSA réunit aujourd’hui quatre associations françaises et leurs partenaires associatifs africains autour des droits à la santé sexuelle et la lutte contre le VIH/SIDA. Cadre de concertation, espace de formation, centre de ressources, ELSA nourrit depuis près de 20 ans le lien entre structures associatives.
Jeudi 26 novembre 2020, il est 12h au Togo, 13h à Paris, 14h au Sud-Kivu en République démocratique du Congo, 15h à Djibouti… Depuis une dizaine de pays d’Afrique et la France, une quarantaine de personnes se retrouvent en ligne pour échanger pendant une heure sur la manière de continuer à mener des actions de lutte contre le VIH/SIDA dans le contexte actuel de pandémie mondiale due au COVID19.
Cette réunion virtuelle est une des activités mise en œuvre par la Plateforme ELSA qui a pour membres quatre associations françaises et leurs partenaires associatifs africains. ELSA, pour Ensemble Luttons contre le Sida en Afrique, est née en 2002 sur l’impulsion du Ministère des Affaires étrangères français en demande d’un espace de concertation pour coordonner la lutte contre le VIH/SIDA à destination de l’Afrique francophone.
« La demande constante du Ministère des Affaires étrangères était qu’il n’y ait pas de chevauchement de fonds, qu’il puisse y avoir une répartition, coordination et une complémentarité des projets » explique Mélanie Brisard, chargée de communication de la Plateforme ELSA. « A la base, la règle était que ce soient toutes des associations qui n’ont pas de personnes expatriées sur le terrain mais qui travaillent avec des associations communautaires » en Afrique, ajoute-t-elle.
En 2002, ELSA réunissait les associations Aides, Comment dire innovations sociales, Crips, Sidaction et Solidarité sida. Fonctionnant au rythme de programmes triennaux, les associations membres de la Plateforme ELSA ont évolué au fil des ans. Aujourd’hui à son sixième programme triennal, ce sont Sidaction, Solidarité Sida, le Mouvement français pour le planning familial et Solthis qui constituent la plateforme. Sans identité juridique, elle est hébergée par un de ses membre – en l’occurrence par Sidaction en ce moment – et a pour co-financeurs la Fondation de France, l’Agence française de développement, la Mairie de Paris. La Plateforme ELSA salarie actuellement trois personnes : une chargée de communication, une responsable des programmes de renforcement des compétences et une coordinatrice.
Cartographier les actions
Pour répondre au besoin de coordination initiale, la Plateforme ELSA a mis en place une base de données qui recense les missions, les actions, les appuis à distance menés par ses membres auprès d’associations africaines. Cet outil permet aux structures françaises de coordonner leurs appuis aux associations partenaires africaines, mais aussi d’identifier des structures, des compétences, des personnes ressources en Afrique pour de nouveaux partenariats, des mises en relation…
« La Plateforme ELSA, c’est un centre de ressources, des formations et un cadre de concertation » résume Mélanie Brisard. Ou pour remettre cela dans l’ordre chronologique : l’espace de coordination initialement souhaité par le Quai d’Orsay est devenue une structure organisant des formations, puis plus récemment animant un centre de ressources ; ces trois pôles d’activités étant in fine intimement entremêlés et indémêlables. « Le but est de faire communiquer les associations entre elles » résume Laïla Loste.
L’échange d’expériences est passé un temps par l’organisation de stages entre associations de pays africains et entre associations françaises et africaines. Pour Mélanie Brisard, c’est « ce sur quoi la plateforme ELSA a réellement été identifiée ces dernières années ». Lors de son dernier plan triennal 2019-2021, la plateforme a réorienté sa stratégie vers une présence renforcée aux côtés des associations membres françaises.
« Le temps de réfléchir »
Des structures françaises ont ainsi pu la solliciter pour obtenir des outils concernant l’intégration du genre dans les organisations, l’écriture inclusive ou la mise en contact avec des compétences particulières. « On a le temps de réfléchir sur des perspectives stratégiques un peu plus longues » que les structures associatives, explique Mélanie Brisard qui souligne la « partie informelle mais vraiment nécessaire » et « souvent plébiscitée » caractérisant le travail effectué par la plateforme. La coordinatrice Laïla Loste cite « l’interconnaissance et la confiance entre équipes » qu’elle suscite. Ces habitudes ont ainsi permis aux associations de mutualiser des connaissances sur les outils numériques, et ainsi s’adapter rapidement en ces temps de télétravail généralisé.
En 2016, le site internet de la Plateforme ELSA est devenu un centre de ressources francophone sur le VIH/SIDA en Afrique, conçu comme « un outil » pour Laïla Loste, « comme une bibliothèque en ligne à destination d’associations » pour Mélanie Brisard. En 2020, le centre de ressources est animé par une dizaine des personnes des associations partenaires africaines et des associations membres françaises. Les membres de ce groupe de travail « se concertent régulièrement pour comprendre ce dont chaque équipe associative a besoin en ce moment, relayer les ressources qui sont produites dans leur réseau, et choisir quelles sont les meilleures ressources à partager sur le Centre de ressources ».
L’une des ressources les plus consultées est le guide de la structuration associative, réalisée en 2012 par un groupe de travail interassociatif mis en place par la Plateforme ELSA. « Il se veut un outil de renforcement de capacités pour les associations engagées dans une démarche d’amélioration de leur structuration », abordant de manière pédagogique et concrète l’administration, la comptabilité, les finances, la logistique et les ressources humaines.
Adapter les ressources
Au printemps 2020, le centre de ressources d’ELSA met en ligne des documents produits par l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) et la Fédération internationale de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge (IFRC) sur les premiers secours psychologiques, la santé mentale et le soutien psychosocial en contexte de pandémie. Ces documents denses peuvent malgré une mise en page léchée être d’une lecture fastidieuse [i].
L’association Solidarité féminine basée à Djibouti, dont la présidente et co-fondatrice Dr Emma Acina fait actuellement partie du groupe de travail du centre de ressources de la Plateforme ELSA, s’est emparée de ces éléments dans sa propre structure associative pour accompagner bénévoles et salarié.es. Solidarité féminine a aussi produit son propre « guide des premiers secours psychologiques pour les acteurs du terrain en période de la Covid 19 » [ii], aujourd’hui en ligne sur le centre de ressources de la Plateforme ELSA. 28 pages rédigées de manière claire et simple fournissent des conseils de choses à faire et ne pas faire pour venir en aide psychologiquement à des personnes, une liste de rumeurs à propos de la COVID19, des questions fréquemment posées, des liens vers des musiques de relaxation. « Notre but est de montrer comment c’est adaptable et c’est adapté » explique Mélanie Brisard.
La Plateforme ELSA a pour objectif la valorisation de l’expertise communautaire. Lors de la réunion en ligne du 26 novembre, les participants ont pu ainsi échanger sur leurs pratiques. Bienvenue Mveng, responsable communication de l’association camerounaise Moto Action présente la manière dont une quinzaine de leaders communautaires ont été formés à distance sur la COVID19, le port du masque et les inégalités de genre face à la pandémie via un outil de e-learning. Eddy Comlan Yehouenou, psychologue clinicien et de la santé et responsable de la prise en charge psychosociale des adolescents et jeunes, pour l’association togolaise Action contre le SIDA décrit une façon de veiller à l’observance thérapeutique à distance, via l’application WhatsApp auprès d’adolescents et d’hommes ayant des relations sexuelles avec des hommes. Actuellement, la Plateforme ELSA organise en moyenne une réunion de ce type par mois, sur une thématique ou sur un pays avec pour effet de « rendre visible et valoriser l’expertise communautaire » résume la coordinatrice Laïla Loste.
En août 2020, le site internet de la Plateforme ELSA s’est agrandi avec de nouvelles pages dédiées aux offres d’emploi et un agenda des événements concernant le VIH/SIDA. Le site internet de la plateforme, sur lequel se trouve le centre de ressources, reçoit entre 3000 et 4000 visites mensuelles. S’y ajoute une page Facebook suivies par 1875 abonnés, un compte Twitter avec 540 followers et une newsletter récemment mise en place et reçue par 300 personnes [iii]. « Plus on partage nos expériences, nos bonnes pratiques, plus on améliorera la lutte contre le VIH/SIDA » souligne Laïla Loste.
[i] https://plateforme-elsa.org/sante-mentale-bonnes-pratiques-pendant-lepidemie-de-covid-19/?ref=search
[ii] https://plateforme-elsa.org/guide-des-premiers-secours-psychologiques/
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