A l’occasion de la conférence AIDS 2020, l’ONUSIDA vient de publier les nouveaux chiffres de l’épidémie VIH pour 2019. Même si, de manière globale, des progrès ont été réalisés, ils ne se sont pas assez importants pour tenir les objectifs fixés pour 2020.
Les chiffres viennent de tomber. En 2019 le monde comptait 38 millions de personnes vivant avec le VIH, dont 1.8 million d’enfants (0-14 ans). Avec 1.7 million de personnes nouvellement infectées en 2019, nous sommes bien loin du but fixé pour 2020 par l’ONUSIDA en 2016 : moins de 500 000 nouveaux cas. Selon les auteurs du rapport, ces données pointent une lenteur dans les progrès accomplis en matière de prévention de l’infection.
Les chiffres annoncés soulignent une disparité géographique dans les nouveaux cas d’infection. Alors que l’épidémie a reculé sur une grande partie des continents (Afrique, Amérique du Nord, Europe centrale et de l’ouest, Asie et Pacifique), elle a fortement progressé en Europe de l’est, en Asie centrale (en augmentation de 72% entre 2010 et 2019). Le Moyen-Orient et le Maghreb ainsi que l’Amérique latine ont également vu une augmentation du nombre de nouveaux cas (22% et 21% respectivement).
Concernant le continent africain, malgré une situation qui s’améliore de manière générale, de grandes inégalités demeurent en Afrique subsaharienne. Les femmes et les enfants y occupent toujours une grande partie des nouveaux cas d’infections. En effet, bien qu’à l’échelle mondiale, le pourcentage de femmes et de filles nouvellement infectées est été de 48%, en Afrique subsaharienne, il était de 59%. De même, 84% des nouveaux cas d’infection chez les enfants ont eu lieu en Afrique subsaharienne.
Les populations clés [i] et leurs partenaires regroupent 62% des nouvelles infections à l’échelle mondiale, alors même qu’elles occupent une faible proportion de la population générale. Ce pourcentage augmente fortement dans certaines régions comme en Europe de l’est et en Asie centrale (99% des nouveaux cas d’infections) et au Moyen Orient et au Maghreb (97% des nouveaux cas d’infections). La stigmatisation et les discriminations à l’encontre de ces populations représentent des freins importants pour l’accès aux soins. Les enquêtes menées auprès des personnes vivant avec le VIH montrent que les discriminations au sein même des centres de santé (dénis de soins, attitudes, procédures forcées ou violation de confidentialité) restent très répandues. Une situation qui décourage ces personnes à connaitre leur statut et se faire soigner.
L’objectif des trois 90 [ii] fixés pour 2020, n’a malheureusement pas pu être atteint. En 2019, 81% des personnes infectées connaissaient leur statut. Parmi elles, 82% étaient sous traitement ARV. Seulement 88% des personnes sous traitement avaient une charge virale indétectable.
Enfin, l’impact du Covid-19 sur l’approvisionnement en traitement antirétroviral (ARV) dans les pays à revenu faible et modéré a été étudié. L’analyse a montré que la fermeture des frontières imposées pour stopper la propagation du Coronavirus a impacté à la fois la production et la distribution de médicaments, pouvant ainsi entraîner une augmentation de leurs coûts et des problèmes d’approvisionnement. Il a été estimé que le coût final des médicaments antirétroviraux exportés d’Inde pourrait être de 10 à 25% plus élevé que les prix normaux. Une modélisation a également estimé qu’une interruption complète de six mois du traitement ARV pourrait entraîner plus de 500 000 décès supplémentaires dus à des maladies liées au sida en Afrique subsaharienne d’ici la fin de l’année 2021.
[i] Travailleurs du sexe, les détenus, les usagers de drogue, et les membres des communautés LGBTQI+
[ii] A l’horizon 2020, 90% des personnes vivant avec le VIH connaissent leur statut sérologique, 90% de toutes les personnes infectées par le VIH dépistées reçoivent un traitement antirétroviral durable, 90% des personnes recevant un traitement antirétroviral ont une charge virale durablement supprimée.