vih Retour sur la découverte majeure d’un marqueur pour détecter le VIH

23.03.17
Angeline Rouers
7 min
Visuel Retour sur la découverte majeure d’un marqueur pour détecter le VIH

Des chercheurs de l’Institut de Génétique Humaine de Montpellier viennent pour la première fois d’identifier un marqueur spécifique des réservoirs du VIH. Une découverte qui laisse entrevoir la possibilité de les éliminer et apporte une nouvelle pierre à l’édifice de la lutte contre le sida.

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Depuis la fin des années 90, les traitements antirétroviraux- administrés en trithérapies – ont largement amélioré la qualité de vie des personnes séropositives. Les traitements permettent de maintenir le virus indétectable dans le sang, limitant ainsi les risques de transmission. Cependant, bien que le VIH soit contrôlé dans le sang, cela ne signifie pas pour autant qu’il soit totalement éliminé de l’organisme. En effet, le virus peut s’intégrer dans des lymphocytes T CD4 qui vont ensuite devenir dormants. Le VIH, ainsi caché, est protégé des traitements – puisqu’il ne se réplique plus – mais pourra se disséminer en cas de réactivation de la cellule. Les réservoirs s’établissent seulement quelques heures après l’infection, d’où l’intérêt grandissant des chercheurs à mettre au point un vaccin qui permettrait de bloquer au plus vite le VIH dès son entrée. Mais pour les patients, chez qui les réservoirs sont bel est bien présents, l’élimination du VIH nécessite de pouvoir les détecter. Monsef Benkirane, de l’Institut de Génétique Humaine de Montpellier, et son équipe ont justement publié, le 15 mars, des travaux prometteurs à ce sujet dans la revue Nature.

Les réservoirs, obstacles à franchir pour éliminer le VIH

En 2011, Monsef Benkirane et ses collègues étaient déjà à l’origine d’une découverte retentissante : le rôle crucial de la molécule SAMHD1 – produite par les cellules – pour limiter l’infection par le VIH dans les macrophages (une population de cellules immunitaires). Il s’agit en fait d’un système de défense mis en place par la cellule lorsqu’elle détecte un virus entrant. Mais ce dernier n’a pas dit son dernier mot puisqu’il peut contrecarrer l’action de SAMHD1 grâce à son facteur viral vpx. L’année suivante, l’équipe de chercheurs mettait en évidence que ce mécanisme SAMHD1/vpx ne se déroule pas uniquement dans les macrophages mais également dans les lymphocytes T CD4 dormants. De nouvelles connaissances qui leur ont aujourd’hui permis de mettre au point un modèle in vitro de cellules dormantes infectées par le VIH. Autrement dit, un modèle de réservoir du VIH ! Pour cela, ils ont isolé les cellules immunitaires dans le sang de donneurs non infectés par le VIH puis les ont mis en contact in vitro avec le facteur vpx, permettant ainsi de limiter l’activité de SAMHD1 et de faciliter l’infection des cellules dormantes. Il ne leur restait plus qu’à infecter les cellules avec des virus fluorescents, de façon à pouvoir les repérer facilement par la suite. Cette prouesse technique a permis pour la première fois d’étudier sous toutes leurs facettes des pseudo-réservoirs (obtenus in vitro). Les auteurs ont ainsi pu faire ressortir les caractéristiques des réservoirs du VIH et atteindre l’objectif tant espéré : trouver leur tendon d’Achille.

Une découverte peut en cacher une autre

Une cellule se construit grâce à son code génétique, sorte de mode d’emploi qui lui dicte quelles sont les protéines à exprimer ou non. Les chercheurs ont pour habitude d’étudier ce mode d’emploi, autrement dit l’expression des gènes, pour établir une carte d’identité précise et complète des cellules qu’ils étudient. Les gènes sont constitués d’ADN (acide désoxyribonucléique) qui se transforme en ARN (acide ribonucléique) avant d’être traduit en protéines. Monsef Benkirane et son équipe ont analysé l’ARN de leurs cellules dormantes infectées par le VIH (les pseudo-réservoirs). C’est ce que l’on appelle la signature transcriptionnelle. Ils ont ainsi comparé la signature de ces cellules avec celle de cellules infectées non dormantes mais également avec celle de cellules non infectées. 103 gènes se sont révélés être globalement plus exprimés par les pseudo-réservoirs mais seulement un gène – fortement surexprimé – est réellement sorti du lot : FCGR2A, le gène codant pour la protéine CD32a. Cependant, le but étant de pouvoir cibler facilement les cellules réservoirs, mieux vaut vérifier que cette protéine est bien exprimée à la surface de la cellule. En effet, il arrive parfois que l’ARN ne soit jamais traduit et ne donne donc jamais naissance à une protéine. Une vérification que les chercheurs se sont empressés de faire et qui a permis de confirmer que CD32a est bien présent à la surface des réservoirs.

L’art de faire parler les gènes

CD32a est classiquement connu comme étant un récepteur pour les immunoglobulines. Son expression n’avait cependant encore jamais été observée sur des lymphocytes T CD4 mais plutôt sur des cellules de l’immunité innée comme les macrophages et les cellules dendritiques. Les récents travaux de Monsef Benkirane accumulent les preuves en faveur d’une expression de CD32a spécifiquement à la surface des réservoirs. Tout d’abord, ce marqueur n’est pas retrouvé sur des cellules infectées activées (qui produisent massivement du virus contrairement aux cellules dormantes). Ensuite, les chercheurs se sont aperçus qu’il existe une corrélation positive entre la quantité de virus présent dans le génome de la cellule et l’expression de CD32a exprimé à la surface de cette dernière. Enfin, les auteurs ont identifié une petite proportion de lymphocytes T CD4 exprimant CD32a dans le sang de patients séropositifs. En examinant de plus près ces cellules, ils ont montré qu’elles contiennent bien du virus intégré, capable de se réactiver. Pour couronner le tout, CD32a est présent à la surface des cellules même lorsque le patient est sous traitement antirétroviral. Coup dur pour le virus, il ne va pas plus pouvoir rester caché dans les cellules dormantes bien longtemps, les chercheurs ont trouvé un moyen de le débusquer !

CD32a, marqueur spécifique des réservoirs

Les perspectives de cette découverte enflamment toute la communauté scientifique. Bien sûr l’espoir de pouvoir cibler et détruire les réservoirs du VIH se profile et laisse entrevoir la possibilité d’éliminer totalement le virus de l’organisme des personnes séropositives. Cependant « Il n’y a pas d’urgence. Certes, il est primordial de trouver un moyen de guérir du sida au même titre que la mise au point d’un vaccin. Mais aujourd’hui, la véritable urgence est d’améliorer l’accès aux traitements et d’atteindre le fameux objectif 90-90-90. Je pense que nous ne devons pas nous précipiter et vouloir à tout prix se lancer dans des protocoles thérapeutiques basés sur le ciblage de CD32a. Il faut continuer à en apprendre plus sur les réservoirs avant de passer à l‘attaque » tient à souligner Monsef Benkirane. En effet, il est maintenant possible de repérer les réservoirs et de les isoler. Les chercheurs vont donc pouvoir étudier de vrais réservoirs du VIH – provenant directement des patients – et n’auront plus à se contenter de modèles in vitro. Une avancée majeure qui va permettre de mieux comprendre leur fonctionnement. « Nous allons notamment pouvoir répondre à une question brûlante : quel est le niveau d’archivage du virus dans les réservoirs ? A savoir, peut-on y retrouver du virus âgé de 10 ou 20 ans ? Nous allons pouvoir en apprendre plus sur la stabilité des réservoirs ! » se réjouit Monsef Benkirane. Son équipe s’active en ce moment même pour répondre à ces questions, viendra – ensuite – le moment de transformer l’essai en se penchant sur le développement de nouvelles thérapies pour éliminer les réservoirs du VIH !

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