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En 2023, Sidaction soutenait 35 associations à l’international, principalement en Afrique francophone, ainsi qu’en Europe de l’Est, pour un budget de 1,84 million d’euros. Au fil des ans, ce soutien a évolué en cherchant à rester au plus près des besoins des structures accompagnées et en épousant les grands mouvements de la lutte contre le VIH/SIDA, de l’accès aux traitements à la prévention et la prise en charge des populations clés.
1997 : Ensemble contre le SIDA, créé trois ans plus tôt, lance son premier appel à projets international. Les premiers financements sont accordés à des associations de personnes vivant avec le VIH/SIDA en Afrique. En l’absence de traitements efficaces et face à la progression de l’épidémie, la mobilisation des personnes malades structure le paysage associatif naissant. Elles s’organisent en groupes d’autosupport ; et c’est vers ces associations locales de santé communautaire qu’Ensemble contre le Sida – qui prendra par la suite le nom de Sidaction – se tourne pour nouer des partenariats hors des frontières françaises.
Certaines relations initiées à ce moment perdurent jusqu’à aujourd’hui. Au Burundi, par exemple, l’association nationale de soutien aux séropositifs et malades du SIDA (ANSS) accompagnée par Sidaction depuis 1998 est devenue un acteur central de la lutte contre le VIH dans son pays. La structure s’occupe notamment du Centre Turiho, le premier centre de prise en charge médicale au niveau national.
En 2002, ce sont les difficultés d’accès aux traitements qui poussent Sidaction à déployer l’un de ses premiers programmes internationaux. Le Partenariat pour l’accès aux antirétroviraux (PAARV) œuvre à faciliter l’accès aux traitements pour les responsables associatifs, les militants et les soignants des centres de soins de santé communautaires financés par Sidaction. Les trithérapies antirétrovirales existent depuis 1996, mais leur accès tarde à se concrétiser pour un grand nombre de malades dans les pays du Sud en raison des blocages de l’industrie pharmaceutique.
Sidaction se pose rapidement la question de l’accompagnement des associations soutenues financièrement. Comment renforcer la capacité de ces acteurs locaux ? « Les associations de personnes concernées ont besoin de se structurer pour passer à l’échelle de la prise en charge et de la prévention. Des questions très concrètes se posent alors : comment se structurer ? Quelle gouvernance associative adopter ? » détaille Emilie Henry, directrice Pôle Qualité et Recherche en santé chez Sidaction.
Des partenariats avec des associations locales
« Assez vite, Sidaction travaille dans l’accompagnement de ces structures en plus d’être financeur. » Il s’agit entre autres de permettre aux partenaires de développer une méthodologie de projet pour répondre aux exigences des bailleurs de fonds internationaux, et ainsi gagner en autonomie et ancrer leur action dans la durée. L’accès à la formation a aussi été un élément clé de l’accompagnement des partenaires associatifs internationaux.
Ainsi des approches thématiques se développent. La question du VIH pédiatrique donne par exemple naissance au programme Grandir, qui débute en décembre 2005 pour la prise en charge des enfants vivant avec le VIH dans onze pays d’Afrique centrale et de l’Ouest. Depuis, ce réseau se tourne vers des actions de plaidoyer pour une meilleure représentation et prise en considération des problématiques des jeunes, dessinant un mouvement qui passe de la prise en charge thérapeutique au plaidoyer porté par les principaux concernés.
L’action internationale de Sidaction repose sur le partenariat avec des associations locales, qu’il s’agit de soutenir financièrement et d’accompagner techniquement, mais sans faire à leur place. Pour cela, il faut d’abord identifier les structures déjà existantes. Jusqu’en 2022, l’appel à projet international de Sidaction est fermé, c’est-à-dire que seules les associations invitées à candidater peuvent déposer un dossier. « Il y a une identification préalable des partenaires avant leur candidature lors de missions de terrain », explique Hélène Roger, responsable pendant cinq ans des partenariats internationaux et aujourd’hui Directrice Analyses et Plaidoyer chez Sidaction. « Ce qui nous permet aussi de prioriser les besoins. »
Tous les ans, les projets sont examinés par un comité international externe à Sidaction qui décide des financements alloués. Jusqu’en 2016, les appels à projets internationaux se faisaient par thématiques. Pour plus de simplicité, un appel à projet unique offre depuis 2016 plus de flexibilité aux associations candidates. Sidaction a fait le choix de soutenir dans la durée ses partenaires, créant une relation qui dure parfois depuis près de trente ans. « Même quand les associations grandissent, l’accompagnement évolue mais généralement il perdure », souligne Emilie Henry.
L’Afrique de l’Ouest particulièrement ciblée
Aujourd’hui, la grande majorité des associations soutenues se trouvent en Afrique francophone. Elles sont réparties dans quinze pays à l’Ouest et au centre du continent (Bénin, Burkina Faso, Burundi, Cameroun, Côte d’Ivoire, les deux Congo, Guinée, Mali, Niger, Tchad, Togo), ainsi qu’au Maroc, à Djibouti et à l’île Maurice. En Afrique subsaharienne, la situation du VIH reste préoccupante ; le continent concentre toujours la grande majorité des décès dus au virus à travers le monde.
Autre ancrage géographique de Sidaction : l’Europe de l’Est, où quatre structures locales sont accompagnées en Roumanie, en Ukraine et en Russie. Dans cette région du monde, la dynamique de l’épidémie est particulièrement alarmante, puisque la prévalence du VIH et les décès liés au virus sont en hausse. A cette situation épidémiologique s’ajoute désormais un contexte sécuritaire et politique particulièrement difficile.
Les quelques partenariats entretenus par le passé dans des pays d’Asie et d’Amérique du Sud ont progressivement été arrêtés il y a quelques années « pour se reconcentrer sur l’Afrique francophone, où il y a moins de financeurs anglophones », explique Hélène Roger. Bien que moins massivement touchée que l’Afrique australe, les indicateurs de l’Afrique de l’Ouest et du centre témoignent de retards pris dans le dépistage et la prise en charge. « Nous cherchons à soutenir des associations qui dans un environnement répondent à des besoins qui ne sont pas couverts », résume Hélène Roger. « Des associations qui portent des voix qui sont moins entendues. »
Ainsi, ces dernières années, Sidaction a accordé son soutien à de nouvelles associations communautaires, militant pour les droits de populations clés, de minorités sexuelles, souvent très éloignées de l’accès aux soins. BAPUD au Burundi et Paroles autour de la santé en Côte d’Ivoire agissent ainsi à destination des personnes usagères de drogue. Au Cameroun, Transamical, créée en 2020, travaille à l’accompagnement des personnes trans. « On retrouve ainsi un peu l’esprit des soutiens que nous avons eu historiquement avec des associations communautaires de base », pour Emilie Henry.