#Sidaction2024 – Il y a 30 ans, le premier Sidaction

Le 7 avril 1994, se déroulait le premier Sidaction, diffusé de manière simultanée sur sept chaînes télévisées. Son succès dépassera toutes les attentes, aussi bien en termes d’impact médiatique que de collecte de fonds.

L’histoire commence en 1985. De retour des Los Angeles, où elle est témoin de la peur et de la souffrance générées par l’épidémie naissante, Line Renaud décide de mobiliser le monde du spectacle face au VIH/sida, comme l’a fait son amie Liz Taylor aux Etats-Unis. « Je n’étais pas destinée à créer une association de lutte contre le sida », ironise-t-elle [i]. « Pourtant, à peine arrivée chez moi [après avoir été interviewée, au JT, suite au décès de l’acteur Rock Hudson, début octobre 1985], les téléphones n’arrêtaient pas de sonner. Toutes les personnalités du spectacle me contactaient et me disaient ‘Line, il faut que tu y ailles, il faut que tu fasses quelque chose’ ». Elle décide alors de lancer l’Association des artistes contre le sida (AACS), première ébauche en France d’une mobilisation médiatique contre le VIH.

Face aux morts qui s’accumulent, au désarroi de personnes testées positives mais démunies de traitement, l’heure est à la mobilisation. Plusieurs associations voient le jour au fil des années 1980, dont Aides en 1984, Arcat-sida en 1987, Act Up-Paris en 1989. Or malgré cet élan inédit, de nombreuses associations accompagnant les personnes vivant avec le VIH sont financièrement à la peine, alors que les besoins ne cessent de croître. En cause, une réticence des autorités sanitaires non seulement à financer des structures qui ne sont pas animées par des professionnels de santé, mais aussi à reconnaître l’approche communautaire prônée par les associations. Au cœur de la lutte contre le VIH/sida, cette stratégie, née avec l’épidémie de VIH/sida, est alors jugée contraire à l’idéal ‘universaliste’ du système de santé français.

« Les Ddass [directions départementales des affaires sanitaires et sociales, regroupées en 2010 dans les agences régionales de santé, ARS] finançaient des programmes d’aide aux malades, des groupes de parole, des actions de prévention, mais tout devait être bénévole, car l’administration ne voulait pas financer le fonctionnement des structures. Il s’agissait donc d’aller chercher l’argent ailleurs, parce qu’on en avait besoin », se souvient Frédérique Viaud, responsable de programmes chez Sidaction, dont elle fut l’un.e des trois premier.ère.s salarié.e.s.

Avec les chaînes, des tractations difficiles

Pour répondre aux besoins financiers, un collectif d’associations, de médecins et de chercheurs décide de lancer une grande émission télévisée de mobilisation, afin de sensibiliser et d’informer le public, et bien sûr de collecter des fonds. Pour cela, ils créent l’association « Ensemble contre le sida » (ECS), officiellement fondée le 17 février 1994. Parmi ces associations, quatre ont le statut de fondatrices (Association des artistes contre le sida, Aides, Arcat-sida, Act Up-Paris), tandis que 13 autres sont partenaires. Une fois collectés, les fonds seront répartis à parts égales entre, d’une part le soutien à la recherche, d’autre part le financement de projets associatifs.

Avant cela, trois émissions spéciales consacrées au VIH/sida (1985, 1990, 1992) ont déjà eu lieu sur TF1 ou Antenne 2, mais sans réellement changer la donne. Cette fois-ci, il s’agit de voir plus grand, en convaincant les chaînes, par ailleurs très sensibles au fléau sanitaire en cours, de diffuser simultanément la même émission. Line Renaud et Pierre Bergé, alors président d’Arcat-sida, devront pourtant batailler de pied ferme avec les directions des chaînes pour qu’elles consentent finalement à une émission commune. « Les chaînes entretiennent des relations très concurrentielles, leur réticence avait plutôt trait à la mise en place d’une émission commune. Aujourd’hui, cela serait impossible ! Pour les 25 ans de Sidaction, nous sommes parvenus à obtenir cinq minutes en commun, et cela a été très difficile », rappelle Florence Thune, directrice de Sidaction.

Deux mois après la création d’ECS, le pari est largement gagné. Diffusé le 7 avril 1994 sur sept chaînes de télévision, épaulées par les plateformes téléphoniques de Sida Info Service, le premier Sidaction, qui mêle témoignages, information sur le VIH et appel au don, dépasse toutes les espérances : 23 millions de téléspectateurs, près de 300 millions de francs (45,7 millions d’euros) récoltés en une seule soirée ! Cet argent sera confié à la Fondation de France, qui, durant les premières années d’ECS, aura la charge de gérer les fonds récoltés. En 1994, l’association, encore embryonnaire, ne compte d’ailleurs que trois salariés, dont son premier directeur Hugues Charbonneau, alors vice-président d’Act Up-Paris.

624 projets associatifs financés en 1994-1995

Quant au parcours de sélection des projets, il dépend avant tout de leur nature. Pour les projets émanant d’associations (prévention, soutien aux personnes), ECS s’appuie sur un comité associatif, lui-même épaulé par un bureau regroupant les associations fondatrices. Les projets faisant l’objet d’un avis positif seront ensuite soumis pour approbation au conseil d’administration de Sidaction, qui regroupe, selon un modèle conservé jusqu’à ce jour, acteurs associatifs et scientifiques. Quant aux projets scientifiques, c’est la Fondation pour la recherche médicale (FRM) qui sera d’abord chargée, via un comité ad hoc, de leur évaluation et de la décision de financement. Les partenariats avec la FRM et la Fondation de France prendront fin à la fin des années 1990, lorsqu’ECS, désormais plus étoffée et reconnue ‘établissement d’utilité publique’ en 1998, décide de reprendre en main la gestion des fonds et la validation de l’ensemble des projets.

Lancé dès juin 1994, soit deux mois après l’émission télévisée, le premier appel à projets associatifs s’articule en trois tranches de financement. La « tranche A » sera destinée aux associations fondatrices et partenaires d’ECS, la « tranche B » à des projets existants menés par d’autres associations, la « tranche C » à de nouveaux projets. Et surtout, contrairement aux fonds publics, ceux issus du Sidaction permettront de soutenir non seulement des projets, mais aussi le fonctionnement des structures associatives, assurant ainsi leur survie. En tout, 624 projets associatifs seront financés en 1994 et 1995 grâce à cette première émission. Dès 1997, ECS s’ouvre à l’international, avec de premiers projets financés en Afrique. Après 11 ans d’existence, l’association décide en 2005 de changer de nom, se rebaptisant du nom de l’évènement télévisé, « Sidaction ». Un mot qui, 30 ans après son apparition, aura réussi à s’imposer comme une ‘marque forte’ de la lutte contre le sida.

Faire un don à Sidaction

→ En ligne sur notre site www.sidaction.org
Le don en ligne (paiement 100% sécurisé) est plus rapide et plus économique.

→ Don par SMS au 92 110 Si vous voulez faire un don : envoyez par SMS le mot DON au 92 110. Un don de 10 euros sera reversé à Sidaction.

Important : 66% du montant de votre don est déductible des impôts.