vih Un des mécanismes de contrôle naturel de l’infection dévoilé

21.06.18
Nora Yahia
4 min

Alors que la majorité des individus infectés par le virus VIH doivent suivre un traitement à vie pour contrôler l’infection, une très faible proportion (inférieure à 0.5%) est capable de contrôler naturellement le virus. Ces personnes, que l’on nomme contrôleurs du VIH, sont capables de maintenir une faible charge virale sans prendre de médicament. Les nombreuses études menées sur ces patients ont permis de mettre à jour le rôle des lymphocytes T CD8 et de facteurs génétiques liés aux molécules de CMH1 dans cette protection. Cependant, tous les mécanismes n’ont pas encore été dévoilés, notamment en ce qui concerne les lymphocytes T CD4.

Alors que chez les personnes infectées, les lymphocytes T CD4 sont détruits par le virus, chez les contrôleurs du VIH le taux de lymphocyte T CD4 est relativement stable. Ces cellules semblent contribuer au contrôle de l’infection, mais on en sait peu sur la manière dont elles agissent sur le virus. Des travaux du Dr Chakrabarti ont apporté quelques éléments de réponse. Le contrôle du virus est en partie associé à la mise en place d’une réponse cellulaire très sensible des lymphocytes T CD4, car ils sont capables de détecter des quantités minimes d’antigènes du VIH. Des récepteurs TCR2 présents sur les lymphocytes TCD4 jouent un rôle très important dans cette réponse. Ces récepteurs ont la particularité de reconnaitre le morceau le plus conservé de la capside virale, le peptide Gag293, et d’avoir une forte affinité3 pour ce peptide. Ces récepteurs TCR ont également la particularité de pouvoir reconnaitre le peptide Gag293 présenté par plusieurs molécules de CMH différentes, phénomène nommé restriction croisée. Cette capacité à lier différentes molécules de CMH est importante, car elle augmente les chances de détection du peptide.

Les équipes de recherche, dont les travaux ont été publiés cette semaine dans Science Immunology4, ont mené une analyse poussée de la structure de ces récepteurs TCR, et ont pu établir les mécanismes de base à l’origine de cette restriction croisée. Leur analyse indique également que l’affinité des TCR pour le peptide est un composant clé dans l’acquisition de la fonction cytotoxique par les lymphocytes T CD4. En effet, des expériences menées in vitro ont montré que la présence de ces TCR de haute affinité dans des cellules T CD4 était suffisante pour leur conférer la capacité à tuer des cellules cibles infectées. Les chercheurs suggèrent que ces cellules T CD4 contribueraient, avec les lymphocytes T CD8 et les cellules Natural Killer, au contrôle du virus. Ces données pourraient ouvrir la voie à la mise en place d’immunothérapie chez l’homme mais ils doivent être d’abord confortés dans des modèles précliniques.

Notes

1- CMH : Complexe Majeur d’Histocompatibilité. Ce sont des molécules qui sont impliquées dans la présentation des antigènes aux lymphocytes T dans le but d’activer la réponse immunitaire. Ces molécules sont présentes à la surface des cellules présentatrices d’antigène.

2- TCR : T Cell Receptor, ou Récepteur des cellules T. Ces récepteurs, qui se trouvent à la surface des lymphocytes T, reconnaissent les peptides présentés par les molécules de CMH. La liaison du TCR au complexe peptide-CMH entraine une série de réactions induisant l’activation des lymphocytes T.

3- L’affinité mesure la force et la stabilité de la liaison entre le TCR et le peptide

4- http://immunology.sciencemag.org/content/3/24/eaat0687

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