Éradiquer le sida de la capitale en 2030 et atteindre dès 2020 l’objectif des « 3×90 » de l’Onusida : tels sont les objectifs affichés par Paris.
Signataire en 2014 de la Déclaration de Paris dans laquelle 200 villes s’engageaient à éradiquer l’épidémie, la ville a confié à France Lert, ancienne directrice de recherche à l’Inserm, la définition de la stratégie pour y parvenir. « Vers Paris sans sida », son rapport présenté début février, préconise de miser sur la prévention combinée et de cibler les populations les plus concernées : gays/hommes ayant des rapports sexuels avec des hommes (HSH) et migrants (les plus forts taux de contamination), PVVIH, trans et travailleur(euse)s du sexe. Élaboré avec un comité de 130 personnes, il témoigne d’une mobilisation nouvelle. « Je crois au travail collectif, on sent un optimisme, une envie d’avancer, et les acteurs ont confiance dans la réalité de l’engagement de la ville », souligne France Lert. « Paris a tous les outils pour réussir : des services hospitaliers au top, de la science, de la pratique clinique, des associations vivantes et mobilisées, une connaissance très fine de l’épidémie. Si on ne réussit pas à Paris… »
Selon les chiffres cités par France Lert, Paris comptait 17 501 personnes avec une Affection longue durée (ALD) VIH en 2013, dont près de 3 800 enregistrées entre 2011 et 2013. Cinq fois plus élevée à Paris que la moyenne française, l’épidémie se concentre parmi les HSH (52,5%) et les migrants contaminés par voie hétérosexuelle (38,3%). Partant de l’idée qu’il existe une prévention pour chacun, le rapport donne des orientations pour chacune des populations en matière de prévention combinée.
Une épidémie spécifique
Cinq fois plus élevée à Paris que la moyenne française, l’épidémie se concentre parmi les HSH (52,5%) et les migrants contaminés par voie hétérosexuelle (38,3%)
Cinq fois plus élevée à Paris que la moyenne française, l’épidémie se concentre parmi les HSH (52,5%) et les migrants contaminés par voie hétérosexuelle (38,3%)
Autorisée par Marisol Touraine depuis le mois de janvier et dispensée en RTU (Recommandation temporaire d’utilisation), la Prophylaxie pré-exposition (PrEP) prend toute sa place dans le dispositif. Prescrite dans les services d’infectiologie, elle doit l’être dans les nouveaux centres gratuits d’information, de dépistage et de diagnostic (Cegidd) parisiens. Traiter implique de dépister, et là, Paris n’est pas très performante. « Nous sommes bons sur les deux derniers objectifs 90, souligne Bernard Jomier, adjoint au maire de Paris chargé de la santé. Notre problème, c’est le premier 90. » Les cartographies réalisées pour le rapport permettent d’identifier les zones où l’intensification du dépistage est nécessaire, se réjouit-il : « Les médecins généralistes du nord-est parisien, qui suivent les PVVIH en ALD et qui sont plus sensibilisés à la question, seront de bons vecteurs pour les populations à risques. » Le dépistage en outreach, pour toucher les populations migrantes sur leur lieu de travail ou de convivialité, devrait être soutenu financièrement par la mairie, qui négocie des marchés communs avec Unitaid. Enfin, un dépistage tous les trois mois sera préconisé aux HSH.
D’ores et déjà, une coordinatrice a été nommée par la ville : directrice d’Arcat, Ève Plenel est également chargée de construire une stratégie de communication et de veiller à la montée en charge rapide de la PrEP à Paris, ainsi que du déploiement des programmes. Un comité stratégique est constitué pour animer et rendre compte des réalisations et des difficultés sur le terrain. Le conseil de Paris doit approuver la création d’un Fonds destiné à financer les programmes. Dès la rentrée 2016, assure Bernard Jomier, des campagnes de communication incarneront la volonté d’atteindre un Paris sans sida.